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Vieux 13/06/2011, 21h53
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Par défaut Ahcène Mezani : l'impardonnable oubli

Liberté, le jeudi 25 septembre 2003


Ahcène Mezani : un cas de conscience


Que d’artistes tombés dans les méandres de l’oubli alors que tout le mérite leur revient d’avoir défriché le terrain. Ils se sont investis dans le domaine artistique dans les moments les plus difficiles de l’histoire de l’art national. Ahcène Mezani est de cette race d’artistes qui a su faire honneur à la profession.

Né le 22 mai 1922 à El-Hammam, village situé en Haute-Kabylie, cet élève de Mohamed Iguerbouchène a tôt fait de découvrir sa passion pour la chanson. Par amour de l’art, il s’est donné corps et âme à ce métier qui, pourtant, n’a jamais nourri les siens. Cheikh Missoum, méticuleux dans le choix de ses musiciens, n’a pas hésité à intégrer au sein de son orchestre l’instrumentiste hors pair que fut Mezani.

À l’instar de ses compatriotes, il se retrouva candidat à l’émigration à un âge précoce car, en ces temps-là de grande misère sociale, sa Kabylie natale n’avait rien à offrir à ses enfants. Pour survivre, il fallait s’expatrier et outre-mer, il a eu à exercer divers petits métiers. Durant bien des années, il faisait office d’éboueur à la ville de Paris et, parallèlement à ce gagne-pain, il cultivait son art fétiche en y mettant tout son cœur. Pour s’être frotté aux grands noms de la chanson algérienne, il a réussi à conforter sa formation en la matière et gagner une solide expérience.

À la faveur d’un travail acharné et sans relâche sur les différentes techniques inhérentes au domaine artistique, il a fini par devenir une référence sûre. En s’inventant auteur, compositeur et interprète, il a pu donner toute la mesure de son talent pluridisciplinaire. Il était parmi les premiers chanteurs à avoir introduit dans la chanson kabyle une voix féminine. Ses compositions se sont toujours distinguées par un choix prononcé pour le genre ghrib quant aux istikhbar (préludes).

En 1956 déjà, il gagna ses classes grâce à Yell-is n’ chrif (fille de la dignité), chanson patriotique toute en symboles. Le succès rencontré était immense, ce qui lui a permis d’accomplir une percée notable dans la cour des grands. S’ensuit alors toute une série d’œuvres aussi valables les unes que les autres. En effet, une année plus tard, il enregistra un autre disque où figuraient Zwadj n’ lghorva (mariage de l’exil) qui traite des mariages mixtes et Lekher n’ zman (la fin maudite d’une époque) dont le thème souligne les difficultés de la vie ainsi que la perte de certaines valeurs.

Citons également deux titres enregistrés après l’indépendance, soient Rouh atteghred, rouh ! (va t’instruire, va !), manière judicieuse d’encourager la recherche du savoir et de l’instruction, puis Nhout anfas, moulach tikhras (conseille-le mais donne-lui le libre choix, sinon délaisse-le) pour nous inciter à ne parler qu’à ceux qui nous accordent une oreille attentive.

En 1971, suite à son expulsion de France, il débarqua à Alger et s’installa dans une chambre d’hôtel de la rue Tanger. Sans ressources, il ne faisait que vagabonder dans les ruelles de la capitale. Peiné à l’extrême par le mauvais coup du sort, il avait du mal à cacher ses tourments. La déception se lisait sur son visage. Il ne restait plus rien de son sourire d’antan, sa joie de vivre et son humour à même de décrisper la plus lourde des atmosphères.

Quelques-uns de ses anciens amis, dont Cheikh Nordine et Arezki Oultache, ont tout fait pour le soutenir moralement et l’aider à surmonter cette dure épreuve. Malheureusement, la souffrance était trop profonde. En 1974, il reprend le chemin de son village natal.

Malgré la chaleur des siens, Ahcène Mezani n’a pas réussi à se réveiller du terrible cauchemar dans lequel il a sombré au plus fort de sa carrière. Atteint d’un cancer de la gorge, il rendit l’âme le 24 septembre 1984. Une grande figure de la chanson algérienne venait de s’en aller dans l’anonymat.

Quelle ingratitude ! Que peut bien valoir un hommage à titre posthume si ce n’est un devoir de mémoire. Sa tombe s’en trouve bien fleurie, non ? Quelle consolation !


K. A
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